Un trader achète 6000 tonnes de cuivre et reçoit des blocs de béton peints

12 mars 2021 à 11h33 par FARGIER Emilie

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Tromperie sur la marchandise. Quand les équipes du négociant suisse Mercuria ont ouvert les conteneurs censés abriter leur cargaison de cuivre, elles n'ont trouvé aucune trace de métal, mais des blocs de béton grossièrement peints en rouge. Pas de doute, Mercuria a été victime d'une fraude à hauteur de 36 millions de dollars.

L'histoire se déroule à l'été 2020. En juin dernier, le négociant suisse de matières premières accepte d'acheter 6.000 tonnes de cuivre à Bietsan, un fournisseur turc avec lequel il avait déjà fait des affaires, raconte à Bloomberg Sinan Borovali, avocat de la maison de trading en Turquie. La marchandise est chargée dans un premier lot de conteneurs - il y en aura 300 au total - avant une inspection réalisée par une société spécialisée. Des scellés sont placés sur les portes des boîtes métalliques pour se prémunir de la fraude, poursuit l'homme de loi.

Cargaison remplacée

Il semblerait que les conteneurs aient été rouverts une fois la nuit tombée, le cuivre a été remplacé par des blocs de pierres peints en rouge. Les scellés ont également été remis. Une première partie de la cargaison part du terminal Marport au sein du port d'Ambarli près d'Istanbul. Nuit après nuit, le même sort est réservé aux autres cargaisons. Une fois les cargos en mer à destination de la Chine, Mercuria paie les 36 millions de dollars fin août. La supercherie n'est découverte que lorsque le premier cargo débarque au port de Lianyungang en Chine un mois plus tard. Entre-temps tous les bateaux ont quitté les rives de la Turquie.

13 suspects en détention

Mercuria a décidé de poursuivre son fournisseur auprès de la justice turque, mais aussi de se présenter devant un tribunal d'arbitrage au Royaume-Uni. "Les personnes soupçonnées de crime organisé contre Mercuria ont été placées en détention", a expliqué le trader dans un communiqué écrit dans lequel il remercie les services stambouliotes de lutte contre le crime financier. Treize personnes seraient concernées. Dans ce genre de situation, le négociant peut se tourner vers l'assurance du cargo. Mais Mercuria a découvert que seuls un des sept contrats était réel, les autres étant des faux.

Cette affaire illustre à quel point la fraude gangrène le secteur des matières premières et fragilise les négociants. Au printemps dernier, le négociant de pétrole Hin Leong à Singapour a fait faillite après avoir caché ses pertes et vendu ses stocks de brut qui servaient de garantie. Face à ce type d'affaires, les banques rechignent de plus en plus à financer les traders .